ATP Brisbane : "Rafael Nadal est au rendez-vous… avant le prochain test"

Deux victoires en deux matches, quatre sets remportés pour aucun perdu, pas le moindre break concédé et neuf petits jeux abandonnés. Ces quelques simples chiffres donnent une idée de la qualité assez bluffante du grand retour tennistique de Rafael Nadal après quasiment un an d'absence. Alors que le Majorquin lui-même ne savait pas trop à quelle sauce il allait être manger, force est de constater que c'est plutôt lui qui a dévoré ses premiers adversaires, tous deux classés autour de la 100e place mondiale (Dominic Thiem est 98e cette semaine et Jason Kubler 102e).

Dominer ainsi des joueurs de ce niveau n'a rien d'anodin et non, le "Taureau de Manacor" ne semble pas être revenu seulement pour dire au revoir. "Nadal a répondu présent, constate ainsi tout simplement notre consultant Georges Goven. D'abord physiquement, ce qui était important et le rassure beaucoup. Il a aussi répondu présent dans l'attitude et l'état d'esprit. Dès le premier jeu, il a serré le poing, comme il l'a toujours fait, à fond. Au niveau du coup droit et de sa faculté à tourner autour de son revers pour se décaler, ça a déjà été très bon, voire parfois exceptionnel."

Et d'ajouter : "Il a aussi très bien servi et je pense que c'est quelque chose qui l'aide aussi dans sa reprise. Dans son premier match, il n'a pas eu la moindre balle de break à sauver et a gagné 90 % des points derrière sa première. Ce sont des signes encourageants et qui aident dans la prise de confiance. Très honnêtement, son retour était très attendu et il est au rendez-vous." Si personne n'avait su que Nadal sortait d'une saison blanche, disons-le clairement, ces deux premiers matches en 2024 n'auraient pas aidé à le deviner.

Le feu de la passion pour son sport brûle toujours autant en lui. Ce n'est pas une surprise : il n'aurait pas fait tous ses efforts pour tenter de revenir s'il n'avait plus la même motivation. Les retours de Richard Gasquet, Arthur Fils ou encore Andy Murray, qui avaient tous joué des sets d'entraînement contre le Majorquin ces dernières semaines, incitaient tous à l'optimisme. Mais entre la préparation et la compétition, il y a souvent un monde. Or, Nadal semble avoir opéré la transition sans la moindre difficulté.

A le voir matraquer la balle en coup droit pour étouffer Thiem comme Kubler, le Majorquin aux 37 ans bien révolus semble n'avoir rien perdu de sa férocité. Sa lourdeur de balle et les rotations qu'il lui imprime ont fait des dégâts, et il n'est d'ailleurs peut-être pas anodin que son deuxième adversaire australien se soit fait manipuler l'avant-bras droit alors qu'il était complètement dépassé par les événements. En revers, Nadal n'a pas hésité non plus à prendre la balle tôt pour frapper fort croisé, souvent avec succès. De prime abord, tous les feux semblent donc au vert, même s'il convient de prendre un peu de recul.

"J'ai remarqué en tout début de match contre Thiem que sur des amorties, il était un petit peu raide dans ses courses vers l'avant. Mais ce qui m'avait le plus frappé comme axe de progression après le premier match, c'était le retour de service, nuance Goven. Il a parfois été hésitant, et on n'a pas encore retrouvé le Nadal qui retourne de loin en mettant volume, hauteur et longueur plein centre pour ne pas donner d'angles à l'adversaire. Mais ce n'est pas anormal. Même s'il s'est beaucoup entraîné, rien ne remplace le fait de jouer des matches contre des serveurs différents pour s'adapter rapidement en termes de lecture : lancer de balle, zones… Il y a tout un processus à remettre en place."

La bonne nouvelle pour l'Espagnol, c'est qu'en gagnant, il s'est donné l'opportunité d'enchaîner les matches et d'aiguiser son œil. Force est de constater qu'il n'a pas non plus affronté de grands serveurs jusqu'ici, ni de joueurs aptes vraiment à le déborder par leur puissance ou leur agressivité naturelle. Certes, la balle de Thiem est aussi lourde, mais l'Autrichien manque tant de confiance et de régularité qu'il n'a pas pu incarner une réelle menace.

"Le prochain test aura lieu quand il affrontera un joueur capable de prendre la balle tôt et de jouer fort notamment croisé, acquiesce Goven. C'est dans ces conditions que l'on aura une idée plus précise de la qualité de déplacement et du temps de réaction de Nadal. Parce que Thiem a du mal à retrouver son niveau et c'est un joueur qui a besoin de temps, qui joue souvent balle un petit peu descendante et tout ça donne du temps à Nadal. Et ça pourrait masquer une petite perte de vitesse en explosivité due à la fois à son opération à la hanche et au manque de compétition depuis un an."

Par son parti pris plus agressif – Nadal semble parfois frapper plus fort et plus à plat qu'il ne le faisait jusqu'alors en coup droit –, le "Taureau de Manacor" a dicté le rythme dans ses deux premiers matches. Il n'a pas vraiment laissé l'occasion à ses adversaires de lui faire mal. S'il devait davantage défendre et courir latéralement, serait-il plus vulnérable ? Quelques séquences face à Kubler, qui a gagné la majeure partie de ses points en allant vers l'avant, le laissent supposer. S'il passe l'obstacle Jordan Thompson vendredi, un éventuel duel en demie face à Grigor Dimitrov, très en forme depuis quelques mois, serait riche en enseignements.

"Les vrais tests dans ce tournoi de Brisbane seront potentiellement contre Dimitrov en demie voire Rune en finale, mais on parle des 14e et 8e mondiaux, donc on est déjà dans le très, très haut niveau. Nous parlons d'éventuel problème de déplacement, mais peut-être qu'il n'existe pas. On le verra au fil des matches", conclut Georges Goven. Car le constat principal est bien là : le niveau tennistique de Nadal est déjà si prometteur que l'on est impatient que l'adversité se corse encore. Voilà un sacré enseignement de ce début d'opération "come-back" en attendant l'épreuve de vérité du format long d'un Majeur.