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Coupe du monde de ski alpin à Bormio | Dans la peau d'un pilote de drone : "Mon esprit est avec le skieur"

Julien Pereira

Mis à jour 30/12/2023 à 11:03 GMT+1

Ils sont des acteurs discrets de la Coupe du monde de ski alpin. Depuis plusieurs mois, les drones "FPV" (vue à la première personne) ont totalement investi les épreuves de vitesse pour offrir des images immersives et spectaculaires. Aux commandes de ces engins, des pilotes chevronnés comme Martin Bochatay, capables de nouer une relation presque mystique entre la machine, le skieur et eux-mêmes.

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Ceux qui suivent la Coupe du monde de ski alpin, de près ou de loin, s'en souviennent forcément. En 2015, deux jours avant le réveillon de Noël, lors du slalom de Madonna Di Campiglio, Marcel Hirscher échappe sans trop le savoir au crash d'un drone de plusieurs kilos. L'image est saisissante. Sur les réseaux sociaux, le champion autrichien préfère en rire. Le pire a été évité.
Un autre scénario, plus grave, aurait probablement définitivement écarté ces engins volants des grandes compétitions de ski. Huit ans plus tard, ils sont finalement devenus incontournables dans les épreuves de vitesse. Il faut dire qu'ils ont bien évolué : ils sont désormais plus petits, plus agiles et surtout "FPV" ("First Person View", ou "vue à la première personne") pour apporter une vraie sensation d'immersion au téléspectateur.
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2015 : Quand un drone s'écrasait près d'Hirscher

Aux commandes de ces machines, des hommes. Parmi eux, Martin Bochatay qui, en collaboration avec Theis Media, est l'un des fournisseurs d'images à sensations fortes sur les épreuves de Coupe du monde. Le Français est un pilote. Un vrai. Il le faut, pour contrôler des machines capables d'atteindre les 100 km/h en moins d'une seconde.

Du pilotage et... un "pit stop de F1" !

Celui qui est originaire de Chamonix se prépare donc comme tel. Le matériel, l'entraînement, la course... absolument rien n'est laissé au hasard. "Je conçois mes propres drones, ce sont des machines qu'on ne trouve pas dans le commerce, raconte-t-il. Et à l'entraînement, on utilise des drones différents car on travaille dans des forêts denses. Il y a donc plus de crashes, mais c'est normal : le but est de pousser nos réflexes au maximum."
Comme les athlètes, lui aussi recherche une sorte de flow. "On fait tellement corps avec la machine que lorsque l'on se crashe, on prend une petite claque, explique le pilote. On est en immersion avec les lunettes. On devient le drone en quelque sorte. On peut vraiment parler d'un état second. Mentalement, je ne suis pas dans mon corps. Mon esprit est avec le skieur. Il ne s'en rend pas compte, mais je suis avec lui en train de skier."
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Avec un drone, c'est plus beau : les images les plus folles sur Eurosport

Reste à suivre le mouvement. Ou plutôt, à le faire suivre avec une machine sensible, ainsi qu'un certain nombre de sollicitations extérieures inhérentes à la production télévisuelle. Sur les épreuves de Coupe du monde, Martin Bochatay est accompagné de son "spotter" Thomas Ligonnet, dont le rôle est d'être à la fois ses yeux et son assistant. Notamment lorsqu'il faut changer les batteries de manière expresse.
Petit mais puissant et évoluant à haute vitesse, le drone doit effectivement passer par les stands régulièrement et rapidement, au maximum après deux passages de skieurs. "Avec le froid, les batteries tiennent moins longtemps, détaille celui qui est à la tête de la société MENGA FPV. À Val d'Isère, par exemple, on avait 25 batteries en charge dans une caisse. Après le passage d'un skieur, on est capable de faire poser le drone, le brancher pour éviter qu'il s'éteigne, changer les batteries et le faire redécoller en moins de dix secondes. C'est digne d'un 'pit stop' de Formule 1 !"

Ils font l'unanimité chez les skieurs

Pas de quoi se relâcher, donc, entre deux runs forcément intenses : "J'essaie de suivre le skieur en étant le plus bas possible, détaille le pilote. C'est en voyant le sol qui défile que le spectateur a les meilleures sensations. J'ai la chance de venir de ce sport, donc j'ai une notion de la trajectoire. Je comprends ce que l'athlète est en train de faire. Mais c'est comme un calque : quand on a l'impression que le drone galère un peu, avec des images un peu brutes, c'est souvent que l'athlète galère aussi. Et à l'inverse, si c'est fluide, ça veut dire que le skieur l'est aussi."
Peu de disciplines aussi exposées que le ski alpin peuvent se vanter d'offrir des images aussi immersives, même si d'énormes progrès ont été réalisés ailleurs, au football ou en Formule 1. Les principaux acteurs s'en réjouissent, puisque cela procure une dimension supplémentaire au spectacle qu'il crée. "J'ai récemment eu un message de Ted Ligety, qui me disait que ça rendait quelque chose d'incroyable", confie Martin Bochatay.
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Les contreparties sont nulles. Ou presque. Le bruit du drone, audible à l'antenne, l'est beaucoup moins pour les skieurs en raison de leur concentration, de la vitesse, du vent et des équipements. "Ce qui peut être plus gênant pour eux, en fonction de la position du Soleil, c'est l'ombre du drone, précise le pilote. Elle peut parfois se balader devant eux, sur leurs skis. C'est plus gênant mais quand c'est le cas, on fait en sorte de rester sur un côté."
Et désormais, la sécurité n'est plus un sujet : "On est toujours derrière eux, jamais au-dessus, détaille celui qui est aux commandes. S'il y a un problème sur la machine et qu'elle tombe, l'athlète sera déjà parti loin et la machine tombera plusieurs mètres derrière lui." De quoi éviter une frayeur similaire à celle qui avait entouré Hirscher en 2015.
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