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Afrique du Sud - Nouvelle-Zélande (35-7) : Ces Blacks font peine à voir

Laurent Vergne

Mis à jour 26/08/2023 à 10:52 GMT+2

Réduite en miettes par l'Afrique du Sud sur la pelouse de Twickenham vendredi soir, la Nouvelle-Zélande a quitté Londres avec la plus grosse fessée de son histoire (35-7) et de grosses interrogations à seulement deux semaines du match d'ouverture de la Coupe du monde face à la France. Le chantier est immense, tant les lacunes sont apparues importantes et multiples. Douloureux à voir.

Beauden Barrett secoué après la défaite des Blacks contre l'Afrique du Sud.

Crédit: Getty Images

Le jour où l'équipe de France a eu le malheur de perdre Romain Ntamack pour la Coupe du monde en raison d'une blessure au genou, les Bleus ont vu leur cote baisser significativement chez les bookmakers anglais, au point de céder leur statut de favoris numéro un du tournoi. Une place que la Nouvelle-Zélande avait récupéré par défaut. Tout ceci semble tellement loin désormais. Quelque chose nous dit que les All Blacks, laminés comme jamais vendredi soir à Twickenham par l'Afrique du Sud (35-7, soit le revers le plus important en 131 ans d'histoire), ne sont plus les favoris de la 10e Coupe du monde.
Pour le rugby néo-zélandais, ce n'est pas une défaite mais une humiliation nationale. Surtout contre l'Afrique du Sud qui, elle, a rappelé à deux semaines du coup d'envoi du Mondial qu'elle était championne du monde en titre et principale candidate à sa succession. Samedi matin, la presse néo-zélandais oscille entre la honte et la consternation. C'est un choc. Par moments, les Blacks ont donné la pénible impression d'être la Roumanie avec des maillots noirs. Des joueurs dépassés par les événements et l'adversaire.

Comment en est-on arrivé là ?

Au-delà de l'écart final, ce sont certaines images qui ont frappé les esprits. Comme ce pack dévasté mêlée après mêlée. Ces touches mal maîtrisées qui ont donné l'impression que les joueurs dans l'alignement se voyaient pour la première fois. Cette multitude de ballons perdus au contact. Ou le fait de reculer à chaque impact. Alors, bien sûr, les Blacks ont évolué un peu plus de 40 minutes à 14 après l'exclusion de Scott Barrett.
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Ethan de Groot (Nouvelle-Zélande)

Crédit: Getty Images

Mais cela ne peut suffire à expliquer l'ampleur du désastre. D'abord parce que, paradoxalement, c'est après le carton rouge, juste avant la pause, que les hommes de Ian Foster ont connu leur meilleure période, inscrivant même un essai finalement refusé qui aurait vu servir de tremplin pour le second acte. Ensuite parce que même avant de se retrouver en infériorité numérique, les triples champions du monde subissaient déjà la pression et la loi des Boks.
Cette équipe a pris l'eau de toutes parts. Elle a cédé collectivement, aussi bien au plan physique qu'au niveau mental. En seconde période, la digue a cédé de tous les côtés et, pour tout dire, ce fut presque pénible à regarder. Le rugby néo-zélandais fait maintenant face, dans l'urgence, à deux interrogations : comment en est-on arrivé là et qu'est-il possible de faire en seulement deux semaines pour colmater non pas les brèches mais les crevasses qui ont été révélées au grand jour à Twickenham ?

L'été de toutes les illusions

Une chose est sûre, certains joueurs n'ont pas été remplacés dans la génération dorée des années 2010. Les McCaw, Carter, Nonu, Read et ainsi de suite. Des joueurs de classe mondiale, pour beaucoup références planétaires à leur poste, n'ont pas trouvé de successeurs, ni sur le terrain ni dans le leadership. Comme un symbole, Sam Cane, le capitaine de la maison noire, avait le regard vide vendredi et semblait peiner à trouver les mots pour remobiliser ses troupes en seconde période, au cœur de l'orage.
Pourtant, le Rugby Championship, cet été, avait laissé espérer un retour au sommet. Les Blacks y avaient remporté leurs trois matches contre l'Argentine, l'Afrique du Sud et l'Australie, et même quatre en ajoutant la Bledisloe Cup face aux mêmes Wallabies. Une simple illusion, en réalité. Vendredi, à Londres, c'était autre chose. Un vrai match de Coupe du monde, déjà, dans l'intensité, l'engagement, et l'intention. Les Springboks se sont manifestement préparés pour ça. Prêts, les Blacks ne l'étaient pas.
Il reste désormais 13 jours pour sauver ce qui peut l'être. "Je préfère que nous apprenions ce genre de leçons maintenant que dans deux semaines", a plaidé le sélectionneur. Ian Foster n'a pas tort. Il est tout aussi vrai que l'on a déjà vu le passé certaines équipes humiliées avant la Coupe du monde, et parfois même pendant. Rappelez-vous de la déroute du XV de la Rose en 2007 face à l'Afrique du Sud lors de son premier match (0-36). Un mois et demi plus tard, les deux équipes se retrouvaient en finale. L'équipe de France, elle aussi, a su passer du rien au presque tout, comme en 1999.
Mais il faudra déjà mesurer l'impact psychologique du choc. La Nouvelle-Zélande n'est pas la France ou l'Angleterre. Ils sont les All Blacks et ce vide abyssal n'est pas leur quotidien. Peut-être leur ego sera-t-il fouetté au point de rendre "salvateur" ce naufrage. Mais il peut aussi laisser des traces trop profondes si près de la compétition.

Bête blessée

Puis, comment combler autant de lacunes, dans pratiquement tous les secteurs du jeu ? D'autant que Foster a quasiment aligné son équipe-type face à l'Afrique du Sud. Il ne dispose pas d'une foule de solutions de rechanges. Seuls l'ailier Mark Telea et le jeune demi de mêlée remplaçant Cam Roigard, entré en cours de jeu, ont surnagé. Car le néant collectif s'est doublé de faillites individuelles au moins aussi spectaculaires. Pour la faire courte, les All Blacks sont devenus ordinaires. Des joueurs et une équipe comme il y en a beaucoup.
Facteur aggravant, ils ont sans doute perdu Scott Barrett, au moins pour le match d'ouverture face à l'équipe de France le 8 septembre. Le prix de son exclusion pour un geste stupide sur Pieter-Steph du Toit. Auteur d'une excellente saison, le petit frère de Beauden s'est puni tout seul tout en ajoutant un souci supplémentaire à la longue liste de problèmes de son équipe. Elle n'avait pas besoin de ça. La Nouvelle-Zélande pourrait aussi se passer Tyler Lomax, son pilier droit, blessé à la jambe. L'étendue des dégâts reste à déterminer mais ce n'était pas beau à voir et Ian Foster ne respirait pas l'optimisme à son sujet après le match.
Jamais la Nouvelle-Zélande n'aura abordé une Coupe du monde dans une pareille situation. Logique, après une telle catastrophe nationale. Les gens du pays au long nuage blanc n'ont pas l'habitude d'être rugbystiquement humiliés. On les voyait toujours arriver avec leurs gros sabots pour marcher sur le reste du monde. Cette fois, ils vont s'avancer sur la pointe des pieds. Désormais, ce sera, d'abord, une question de fierté. C'est une bête blessée, ravagée même, que la France va trouver sur son chemin au Stade de France. C'est, aussi, une raison de plus de se méfier.
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Scott Barrett suspendu après son expulsion ?

Crédit: Getty Images

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