Euro 2024 - Equipe de France - Bleus - Faut-il se faire à une vie sans Antoine Griezmann ?

Parce que son règne n'est pas encore tout à fait achevé, il est bien difficile de mesurer l'œuvre d'Antoine Griezmann en équipe de France. Quoiqu'il arrive d'ici la fin (de l'Euro ou de sa carrière), elle est et restera monumentale. Le champion du monde figure aujourd'hui parmi le top 10 et même peut-être le top 5 des joueurs les plus importants de la sélection. Ce statut, il le doit à son talent et à la relation de confiance établie avec Didier Deschamps. Depuis 2016 et un tournoi où il a explosé, son nom est le premier que couche le sélectionneur sur la feuille de match.

Si Kylian Mbappé prend toute la lumière, c'est bien Griezmann qui incarne le mieux l'ADN de cette équipe : un sens du collectif et du sacrifice qui permet de tout renverser. En ce sens, le Madrilène est l'héritier de Didier Deschamps, son plus fidèle avatar sur la pelouse. "Tu es quand même un peu mon chouchou", finira même par lâcher le sélectionneur tout sourire en novembre dernier devant les caméras de Téléfoot. "Pour une équipe, c'est merveilleux de l'avoir. Une relation humaine et de confiance s'est créé", se réjouissait Deschamps à l'automne.

Ni les coups de mou quand il jouait à Barcelone, ni le retour de Karim Benzema n'ont fragilisé Griezmann en bleu. L'équipe de France est toujours restée l'équipe sur laquelle il veillait avec un dévouement sans limite. Généreux, sans arrière-pensée, toujours guidé par le projet collectif. Les Bleus resteront la colonne vertébrale de sa carrière, lui qui n’a joué qu’en Espagne et a cherché, sans doute plus que d'autres, la reconnaissance de son pays à travers les succès de la sélection. "Je donne tout pour le maillot, la France, mais aussi pour lui (ndlr : Deschamps). Chaque match, chaque action, c'est comme un merci que je lui adresse. Je veux tout faire pour qu'il soit fier de son numéro 7", déroulait Griezmann lors de la Coupe du monde 2022 quand l'ombre de Zidane planait au-dessus de Deschamps.

Sauf que dans le haut niveau, les vérités sont très éphémères. Il aura fallu deux matches pour que ce que l'on pensait impossible survienne face à la Pologne. Deschamps qui se raidit, Griezmann sur le banc et une entrée en jeu catastrophique. "Il a joué quasiment tous les matches en entier, a tenté de se justifier le sélectionneur après la rencontre. Vous avez un os à ronger. Pour moi, ce n’est pas un problème. Pensez ce que vous voulez, mais ce n’est pas un problème, c’est un choix. Comme Marcus (Thuram) a soufflé aussi. Ça peut arriver à d’autres."

Sauf que comparer Marcus Thuram et Antoine Griezmann, c'est acter le spectaculaire déclassement de l'ancien homme de base. Rien ne le laissait entrevoir. "L’influence d’Antoine dans notre jeu est une part importante. Je le connais aussi, c’est un joueur qui a l’habitude d’enchaîner, reconnaissait DD après le premier match des Bleus. J’ai une totale confiance en lui. Pour nous, c’est important qu’il ait la plus grande influence dans notre jeu." C’est comme si quelque chose s’était cassé.

Certes Griezmann avait déjà soufflé lors du troisième match au Qatar face à la Tunisie mais comme l'ensemble de l'effectif à l'exception de Raphaël Varane. Cette fois, la mise à l'écart ressemble à une sanction alors que Grizou semblait peu en jambes depuis le début du tournoi. Confronté à une rare densité de talents au milieu, Deschamps a-t-il choisi de sacrifier celui auquel il ne touchait jamais ? Quel est désormais le statut de Griezmann ? Comment va-t-il réagir lui qui a toujours joué le jeu même quand son sélectionneur a choisi Mbappé pour porter le brassard de capitaine qu'il convoitait ? Son entrée en jeu complètement à l'envers montre qu'il a été touché. Comment ne pas l'être ? Deschamps lui a d'ailleurs vertement remonté les bretelles lors de celle-ci en lui reprochant un pressing déficient.

Difficile d'imaginer la France en 8e de finale sans Griezmann, ce n'est plus arrivé depuis plus de dix ans et tout ce qu'il s'est passé jusqu'ici, du Brésil au Qatar, a renforcé son rayonnement et sa place dans cette sélection. Mais a-t-il encore la caisse et sa place dans un milieu où il sera difficile de sortir, pour des raisons différentes, Kanté, Rabiot et Tchouaméni. "Antoine, c'est notre deuxième capitaine, a rappelé Dayot Upamecano en conférence de presse jeudi. Il est dans un très bon état d'esprit. Il nous a encouragés, il est souriant. C'est un exemple pour nous tous." Et qu'en pense Deschamps ? Malgré toutes les péripéties de la semaines écoulée, il est encore bien difficile d’imaginer Griezmann ne pas débuter contre la Belgique.