Euro 2024 | Cristiano Ronaldo, des hauts et plus de débat au Portugal

Du tout noir ou tout blanc, d'un indiscutable titulaire au tout banc. L'ère n'étant plus vraiment à la nuance ou à la demi-mesure, voilà un an et demi que le Portugal (son peuple, ses journalistes, ses supporteurs) s'interroge sur le statut de Cristiano Ronaldo en sélection nationale, à l'approche de son sixième Euro - un record qu'il détient seul.

Le débat avait été tranché par Fernando Santos à la Coupe du monde 2022, que la Seleção das Quinas avait quittée après une défaite dans un quart de finale face au Maroc, durant lequel CR7 avait passé plus d'une période sur le banc. Il avait été enterré, pensait-on, par le départ du quintuple Ballon d'Or à Al-Nassr, quelques semaines plus tard.

Finalement, Roberto Martinez est arrivé et sur le papier, presque rien n'a changé : Ronaldo a disputé 81% des matches de qualification à l'Euro 2024. Il a plutôt bien rentabilisé sa présence avec dix buts et deux passés décisives. "O Capitão" est un buteur et le sera probablement jusqu'à la fin de sa carrière, même s'il décidait de l'étendre une décennie de plus.

Son sens du but, ses qualités de coordination, de pied gauche, de timing, de jeu de tête et la peur qu'il instille encore dans les défenses, par sa simple présence, sont des atouts dont Gonçalo Ramos et aucun autre joueur portugais ne disposent. "Il a inscrit deux buts avec une finition de classe mondiale, a commenté son sélectionneur après la victoire face à l'Irlande lors du dernier match de préparation mardi soir (3-0). [...] Ce sont vraiment deux réalisations à montrer aux enfants dans les écoles de foot parce qu'elles sont incroyables."

Personne n'a jamais douté de tout cela. Chacun avait simplement fini par se demander si ce que rapportaient ses buts suffisait à compenser ce que coûtait sa présence. Tactiquement, d'abord : Ronaldo n'a jamais été capable de mener un pressing et n'en a ni la culture (ses anticipations et l'orientation de son corps sont rarement opportunes) ni la caisse physique (le poids de l'âge). Psychologiquement, aussi : il était devenu évident que l'attaquant et son exigence démesurée, pour lui-même et pour les autres, avaient exercé une influence directe et indirecte sur le comportement de ses coéquipiers.

Toute la phase de qualification pour l'Euro a bien démontré que tout cela avait changé. Tactiquement, Roberto Martinez a fait progresser cette sélection comme peu d'autres avant lui. Et après tout, une très grande majorité des joueurs qui composent le onze de départ ont gagné, lors de la saison écoulée, des titres plus importants que ceux glanés par le joueur de 39 ans en Arabie saoudite. Et Bruno Fernandes, incontestable leader de cette équipe, Bernardo Silva, Ruben Dias and co. n'ont pas eu besoin de lui pour établir la plus large victoire de l'histoire de la sélection portugaise, face au Luxembourg, en septembre dernier (9-0).

Quelque chose a réellement changé dans le rapport entre CR7 et sa sélection. Les efforts sont aussi venus de lui. "Son engagement est incroyable, a insisté Martinez mardi soir. [...] Ce que j'ai aimé, c'est le travail et le fait qu'il ait essayé d'aider. Il avait déjà marqué deux buts, il s'est retrouvé dans la surface et sa première option a été de chercher ses coéquipiers. Cela montre de la solidarité, de la camaraderie et des valeurs importantes dans un vestiaire en vue d'un Euro."

On le sait, l'homme aux 130 buts en sélection sera titulaire le 18 juin prochain face à la République Tchèque, pour lancer son Euro. Ce qu'on sait moins, c'est à quel point le poids d'une probable dernière compétition internationale pèsera sur ses intentions, ses approches des matches et les sourires qu'il n'a cessé de distribuer, ces derniers mois, à ses coéquipiers. Ronaldo a montré son nouveau visage. On va bientôt découvrir s'il s'agissait d'un masque.