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Tour de France - De Combloux à Florence : le traumatisme et la riposte d’UAE

Benoît Vittek

Mis à jour 28/06/2024 à 13:58 GMT+2

Dominé par Jonas Vingegaard sur les Tours 2022 et surtout 2023, Tadej Pogačar a préparé sa revanche à la tête d'une armada qui survole la saison 2024. Après la défaite, l'équipe UAE Team Emirates a misé gros pour reprendre le pouvoir.

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Quelques tours de roues, et les rapports de force s'inversent drastiquement dans le peloton. Il y a un an, Jonas Vingegaard donnait la leçon à Tadej Pogačar dans les Alpes pour s'offrir un deuxième triomphe en jaune. Avant de perdre son premier sponsor-titre et, semble-t-il, toute forme de chance et de réussite, l'équipe Jumbo-Visma écrasait le peloton pendant que les rivaux d'UAE Team Emirates vivaient amèrement un retour dans le rang tout relatif sur le Tour de France.
À Combloux comme à Courchevel, la superbe de Pogi s'est éteinte brutalement. C'est peu dire qu'elle brille à nouveau au firmament du cyclisme international au moment où toutes les stars se réunissent à Florence pour attaquer le Tour de France 2024, sur lequel le Slovène s'apprête à renouer avec des performances historiques (ressuscitera-t-il le doublé Giro-Tour ; sera-t-il le sera-t-il le plus jeune triple vainqueur de l'histoire du Tour ?). Parce qu'après la gifle, l'équipe UAE Team Emirates a gonflé ses muscles.
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Le traumatisme : Combloux, plus violent que la Loze

Il y a eu le visage livide de Pogačar et les mots, lâchés à la radio pour son équipe : “Je suis fini, je suis mort.” Dans le col de la Loze, une des plus belles monstruosités récemment dénichées par le Tour, les jambes ont lâché, le souffle s’est coupé, le cerveau a failli débrancher, résigné. Pour la première fois peut-être, l’espiègle Pogi s’est vu imposer des limites. Il avait déjà connu la défaite mais, au moins, il avait toujours pu tenter de bousculer les choses. Là, il ne lui restait plus qu’à souffrir, sans espoir, presque sans but.
La défaillance de l’ex-prodige, devenu cannibale, a été spectaculaire. Mais Pogačar avait déjà perdu le Tour avant de se perdre sur la Loze. Après deux semaines de lutte incandescente, Jonas Vingegaard avait passé la première lame la veille dans le chrono entre Passy et Combloux. Son envolée vers Courchevel a donné plus d’ampleur à sa démonstration de force au lendemain d’une performance bien plus significative : en l’espace de 22,4 kilomètres, le Danois avait explosé Pogačar (repoussé à 1’38’’, soit une différence de 4 secondes et demi au kilomètre) et ridiculisé le reste du peloton.
Passée la sidération, semblable à celle qui avait saisi les hommes en jaune et noir lorsque Pogačar avait tout renversé sur La Planche des Belles Filles en 2020, la formation émiratie s’est efforcée de relativiser. La défaillance de la Loze suggérerait que leur champion n’était pas à son mieux, après une préparation tronquée par ses fractures au poignet et à la main gauches. Le Slovène avait pourtant repoussé Wout van Aert (3e) à plus d’une minute. “Pogačar volait, littéralement”, soufflait-on le soir même dans l’entourage du Slovène. “L’équipe était persuadée d’être en jaune aujourd’hui.”

La réaction : Disons qu’on en a marre de perdre

Pogačar s’est rapidement remis en s’imposant sur Le Markstein avant de filer vers de nouvelles victoires du nord au sud de l’Europe. Mais pour ses dirigeants et les bailleurs de fonds émiratis, la défaite passe toujours mal. Le talent unique de Pogačar devait rayonner sur le monde mais, sur le podium des Champs-Élysées, cela fait désormais deux ans de suite qu’ils subissent la loi de Jonas Vingegaard et de son équipe néerlandaise, qui développe des relations de plus en plus concrètes avec l’Arabie saoudite. “Disons qu’on en a marre de perdre”, lâche-t-on encore du côté d’UAE.
Dès l’été, une “super team” se dessine en vue du Tour 2024 avec Adam Yates, Joao Almeida et Juan Ayuso pour accompagner Pogačar. Marc Soler est immédiatement dans les petits papiers, après avoir tracté Pogacar dans l’ascension de la Loze. Le casting est rapidement complété par Pavel Sivakov, Tim Wellens et Nils Politt. Le tout est annoncé en décembre, au moment où Pogačar révèle ses ambitions pour le Giro, dont il assure qu’elles n’entraveront pas son avancée vers le Tour. Six mois plus tard, il s’est baladé en Rosa et tous ses lieutenants (dont aucun n'a participé au Giro) sont présents au rendez-vous qui leur a été fixé.
“Yates est mon bras droit”, a expliqué Pogačar dans le podcast de Geraint Thomas. “Ayuso et Almeida seront des super domestiques en montagne. Soler et Sivakov sont les gars costauds pour la montagne qui peuvent aussi aider sur le plat, et ensuite vous avez Wellens et Polit.” Réaction de Thomas, qui a connu son lot d’armadas avec Sky et Ineos : “Mon dieu, c’est un commando de tueurs !”

Et maintenant : la grande agression ?

Lundi, Pogačar et sa bande sont descendus de la station d’Isola 2000, qu’il pourrait bientôt annexer (19e étape, 2.024 mètres d’altitude, soit la 11e arrivée la plus haute de l’histoire du Tour) et où ils ont apporté les dernières touches à leur préparation commune. Ils ne sont évidemment pas venus à Florence pour admirer les innombrables merveilles de la Renaissance italienne. Ils débordent d’ambition et de confiance, comme le résume le chef de file : “On est impatient de s’élancer et on espère se battre pour la victoire et offrir un beau spectacle.”
La concurrence est bien plus relevée que sur le dernier Giro, où Pogačar n’a pas eu à s’épuiser outre mesure. Comme en mai, la garde juilletiste de Pogi veut également frapper au plus vite, avec un départ particulièrement musclé sur les routes italiennes. Le parcours est taillé pour le Slovène, qui excelle de toute façon sur à peu près tous les terrains. Et la dynamique est inexorablement favorable aux UAE, qui viennent d’écrabouiller le Tour de Suisse et affichent désormais 48 victoires en 2024 (Lidl-Trek suit avec 30 succès).
Surtout, Pogačar a tout intérêt à asseoir son autorité le plus tôt possible, pour mieux étouffer toute velléité contestataire, à commencer par celles d’un Vingegaard condamné à monter en puissance au fil du Tour. Après trois mois sans compétition, le Danois espère trouver ses meilleures jambes dans les dernières grandes ascensions. Mais où se situera-t-il à ce moment-là face à Pogačar ? Remco Evenepoel (Soudal Quick-Step) a peut-être apporté un élément de réponse mercredi : “Je m’attends à ce que Tadej soit quasiment inaccessible.”
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