Tour de France 2024 | Tadej Pogacar et les autres : Casting cinq étoiles et ombre d'un doute

Le Tour est une carte postale et, trois semaines durant, il magnifiera encore les trésors d'ici et d'ailleurs. D'ailleurs d'abord, puisque c'est à Florence, capitale des arts et ville du Lys que prendront racine les rêves d'immortalité d'une poignée d'hommes. D'ici ensuite jusqu'à Nice, théâtre d'une arrivée historique. Pas de Champs-Elysées, pas de Paris et pas de défilé pour les survivants. Suffisant pour faire sauter tous les repères ? Si depuis quelques années, celui du spectacle tient bon, à Florence, flotte dans les têtes l'image d'une promenade. Pas celle des Anglais, celle d'un Slovène.

Pourtant, le casting n'a laissé personne de côté. Julian Alaphilippe a refusé le second rôle que l'on aurait bien aimé le voir endosser, préférant un rêve olympique et parisien mais mis à part lui, toutes les stars ont répondu à l'appel. Des déjà multiples oscarisés sur le Tour (Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard) à ceux qui en sont passés si près qu'on se demande encore ce qu'il s'est passé (Primoz Roglic) en passant par le meilleur espoir masculin (Remco Evenepoel). A eux quatre, ils occupent une large place sur l'affiche.

Mais sur la route, il faudra compter sur d'autres, ceux qui brilleront sur une, deux, trois ou plus de scènes si tout leur sourit, les Jasper Philipsen, Mathieu van der Poel, Wout Van Aert ou Mads Pedersen. Et les Simon Yates (4e en 2023) Carlos Rodriguez (5e), Pello Bilbao (6e) ou Felix Gall (7e) ont tous rempilé. Bousculeront-ils l'ordre établi ? La victoire de l'un de ces hommes serait une monumentale surprise au regard de la densité du dessus, mais leur présence polit un peu plus une liste de départ qui brille de mille feux. De quoi s'assurer que la course se mettra au niveau des somptueux décors et de sa bande-annonce ? Pas forcément.

Car il y a un loup, et même plusieurs, une meute de doutes qui empêche de totalement s'enthousiasmer à l'idée de ces trois semaines italo-monégasquo-françaises. Dans un drôle de jeu de miroir, le sort a mis Jonas Vingegaard dans la peau du Tadej Pogacar de l'an dernier, et inversement. Au Slovène, la peau de celui pour qui tout va bien, malgré ce Covid qui ne nous lâchera donc jamais. Au Danois, déjà content d'être là, les affres de la chute, un gadin plus terrible encore qui n'était pas si loin de se transformer en tragédie absolue pour le double vainqueur sortant ou l'un de ses malheureux compagnons.

Parmi eux se trouvait Remco Evenepoel, qui a pris son temps pour venir sur le Tour de France, où il s'est fait désirer. Sa présence serait une garantie de feux d'artifice s'il n'avait pas promis prudence et patience. Quant à Primoz Roglic, on sait qu'il arrive bien préparé mais rien cette saison ne permet de croire qu'il a les armes pour réellement embêter Tadej Pogacar. Car il s'agit bien de lui, et uniquement de lui. Derrière son sourire d'ange, le coquin a encore envie de voler la vedette à tout le monde. Et à vrai dire, il a de solides arguments sans que l'on sache vraiment lequel est le plus évident, ce qui est sans doute le plus effrayant.

Sa démonstration sur le Giro, le niveau qu'il y a atteint sans donner l'impression de forcer, la force d'une équipe prête à tout pour laver l'affront de 2023 et donc une concurrence un brin cabossée, autant d'atouts dans la manche de celui qui n'en avait déjà pas besoin. S'il était à une table de poker avec ses adversaires, Pogacar aurait un jeu en or tandis que les autres seraient encore à espérer pouvoir tout renverser. Il n'a évidemment pas course gagnée mais…

C'est un peu tout ça à la fois qui pourrait gâcher une fête que l'on annonçait somptueuse. Au moins, se dit-on, les organisateurs ont habilement placé le plat de résistance en dernière semaine, après 15 jours de joutes qui livreront des indices plus que des certitudes absolues, du moins l'espère-t-on. Il y a mille raisons de s'emballer pour le Tour de France 2024, autant de penser qu'il sera décevant et la moitié de croire que l'on se trompe dans un sens ou dans l'autre. Ceci dit, on a quand même très hâte de découvrir de quel côté penchera la balance.