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Premier League - 25e journée : Leicester, le rêve éveillé

Philippe Auclair

Mis à jour 05/02/2016 à 16:30 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Comme à l'époque du couronnement du Nottingham Forest de Brian Clough, en 1978, l'Angleterre se passionne pour le conte de fées de Leicester, une bouffée d'air frais dans un championnat où les "gros" ont d'ordinaire toujours le dernier mot. En espérant que l'aventure se termine sur un happy end pour les hommes de Claudio Ranieri.

Riyad Mahrez (Leicester)

Crédit: AFP

Flotter, les bras en croix, sur une mer tout juste agitée par la plus douce des brises. Naviguer entre songe et éveil dans un lit douillet, chaud d’une autre présence. Être supporter de Leicester City…comme nous le sommes tous un peu, beaucoup, passionnément, jusqu’à la folie de croire que l’impossible ne l’est pas, qu’une équipe vingtième du classement il y a un an de cela pourrait être championne douze mois plus tard, et que si cela se produisait, quelles que soient nos allégeances, nous aurions retrouvé la foi. Serait-ce ça, le bonheur ?
L’un de mes amis les plus proches est un fan de toujours des Foxes. Autant dire qu’il en a bavé. Ses chers renards se sont fait prendre au piège plus souvent qu’à leur tour. Même dans leur propre ville, on ne les prenait pas trop au sérieux. Normal, quand votre équipe de rugby a produit un champion d’Europe à répétition, ou qu’un génie de la batte nommé David Gower s’est révélé dans votre XI de cricket. Même lorsque Martin O’Neill collectionnait les Coupes de la Ligue, Leicester n’a jamais connu ça – ce miracle, ce bras d’honneur adressé aux nababs, aux peine-à-jouirs, à l’argent.
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Leicester Fans

Crédit: Eurosport

Du jamais vu depuis le Forest de Clough

Et chaque semaine, un texto (ou plus) de cet ami sur mon portable. Le dernier en date : "Dommage qu’Arsenal n’ait pas gagné contre Southampton. On aurait pu avoir un match au sommet le 14 février". Ho ho ho. Profites-en, mon vieux. Profites-en longtemps. Et toute l’Angleterre pense comme moi. Tous ceux qui suivent son championnat également, semble-t-il. Jamais depuis que Brian Clough fit de Nottingham Forest un roi couronné en Angleterre comme en Europe (deux fois) n’a-t-on vu un tel enthousiasme pour le dernier de la couvée, le vilain petit canard sorti du wagon de deuxième classe pour piquer la place du gros dans les pullmans.
Clough avait peint un nez de clown sur le visage de Liverpool, Ranieri fait encore mieux. Les caïds composent une belle galerie d’augustes aujourd’hui. Quand on a acheté Jamie Vardy et Riyad Mahrez pour un Benteke divisé par vingt, on a le droit de s’amuser, non ?
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Ranieri et Vardy

Crédit: Imago

Quelque part dans les Midlands, un parieur s’accroche à un bout de papier tamponné par son boomaker en août 2015, sur lequel est écrit: "Leicester City, champion d’Angleterre, 5000/1". Il avait misé 5 livres. Aujourd’hui, il hésite. Vendre ou ne pas vendre, telle est la question. Il trouverait sans doute des preneurs à la moitié de la cote. Mais perdre 12 500 livres… C’est qu’il faudrait être sourd et aveugle pour ne pas croire en Leicester aujourd’hui. Ou "raisonnable". Si Manchester City gagne ce samedi…mais qui a envie d’être "raisonnable" ? Nobody.

Du football plaisir pour tenir tête aux cadors

Là est peut-être le plus beau titre – de gloire – dont Leicester puisse se targuer, quoi qu’il arrive. Ils auront balancé la raison en touche, le plus loin possible, encore qu’il n’y ait rien d’insensé à la reprise de Vardy par dessus le pantin de Mignolet ou à l’incroyable enchaînement de passes en première intention qui aurait dû valoir un penalty à Shinji Okazaki contre Liverpool. Vous l’avez vu ? Si vous l’avez vu, vous l’avez revu, car comment résister à l’envie de le passer en boucle ? Si ce n’est pas le cas, courez-y, et vous serez mordu.
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Jamie Vardy (Leicester) vient d'exécuter sa reprise en demi-volée qui finira sous la barre de Simon Mignolet (Liverpool)

Crédit: Panoramic

Claudio Ranieri l’a si bien dit avant le match contre City. "Le nom de notre adversaire n’est pas important. Ils doivent gagner. Nous devons gagner, et prendre du plaisir. C’est ça la différence." Prendre, et donner, du plaisir. Ranieri, l’anti-van Gaal. Claudio ne fait pas ça pour rien, nous sommes d’accord. Il sera largement, très largement récompensé de son travail. Mais quand Claudio sourit, et rigole, nous sourions et rigolons tous. Ce serait tellement beau si…
Ce serait l’antidote. Une Materazzi dans la boule des cyniques. Un tacle parfait sur les Marchands du Temple, ces acheteurs d’arbitres et d’élections. L’expression d’un espoir. La négation du foot-fric, encore que Leicester ne crève pas suffisamment de faim pour réchauffer des boîtes de conserve sous sa tente : on peut rêver sans être dupe de ce que ce rêve a d’illusoire. Mais voilà plus d’un quart de siècle que je vis dans ce pays, et je n’ai jamais connu ça. Je pourrais vivre vingt-cinq ans de plus ici que je ne le connaîtrais pas à nouveau. Ici, ou ailleurs.
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